Page 5 - Spécial Inclusion
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2. La perte auditive :
un handicap invisible qu’on espère pouvoir cacher aux autres. »
La vie professionnelle suppose de À court terme, se cacher à soi et Et ça, c’est dur de le faire chacun.e la capacité de répondre aux autres son problème d’audition comprendre aux autres. »
à des missions et de participer apporte un soulagement.
à une organisation collective. Le handicap auditif est accentué Chacun.e y a une place définie, qui À moyen et long terme, cette dans le bruit : les espaces de
s’accompagne d’attentes de la part des autres.
Les interactions de cette vie professionnelle sont motivées par un souci d’efficacité dans la réalisation de ces missions. Cette efficacité se traduit naturellement par une attente de fluidité et de réactivité des partenaires qui travaillent ensemble.
La perte auditive, dans le contexte professionnel, est un handicap dont il peut être difficile de parler : l’employé.e a peur du jugement des autres, notamment de passer pour quelqu’un qui n’a pas les compétences attendues, ou qui n’est pas fiable, car il n’est jamais sûr qu’il ait bien eu accès à une information importante.
beaucoup d’explications théoriques. L’espoir de cacher la malentendanc«e Celui-ci nous est donné par une
aux autres est une réaction femme d’une quarantaine d’années normale, car on espère ainsi ne qui a perdu brutalement son
pas démentir la confiance qu’on audition à la suite d’une méningite : a mérité jusque-là par son travail
et ses efforts. La conséquence de « Ce qui est difficile à
cette réaction, cependant, va dans expliquer aux gens c’est qu’il y a le sens opposé que celui espéré : des situations précises où on va la personne s’isole pour ne pas entendre et comprendre parce
prendre de risque de malentendus, ou elle fait « comme si » elle avait entendu et se retrouve davantage en difficulté car elle ne maîtrise pas suffisamment l’information souhaitée.
qu’il y a le contexte, parce qu’il
y a le silence, parce qu’il y a des situations précises comme ça. Mais ce n’est pas le cas tout le temps, ce n’est pas le cas partout, ce n’est pas le cas avec tout le monde.
réaction conduit à une impasse, car il faut apprendre à vivre avec ce handicap et il faut aussi apprendre aux autres comment l’atténuer dans les interactions.
Nul apprentissage n’est possible dans la fuite du problème.
Le cœur de la perte d’audition tient en un mot clé : la variabilité de ce handicap invisible. D’un moment
à l’autre, la difficulté d’accès à l’information n’est pas la même. Cette variabilité rend le handicap difficile à saisir pour l’entourage. Contrairement à l’image habituelle du fauteuil roulant, qui rend visible la difficulté d’accès à l’espace social, il n’y a pas pour l’audition de repère aussi net.
Un témoignage vaut parfois
travail, les réunions augmentent
la difficulté de compréhension.
Le bruit fatigue la personne malentendante, car elle doit redoubler d’effort pour comprendre les autres. Dans les espaces calmes et les interactions en face-à-face,
la difficulté est moindre au point que la personne peut dire : mais j’entends très bien si les autres font l’effort d’articuler !
Le contexte professionnel n’offre pas toujours, loin de là, des conditions aussi favorables. Plus il est difficile d’accéder à l’information – à cause du nombre de personnes dans
la salle ou de la présence de plusieurs sources sonores en même temps – plus une réaction défensive se met en place.
La personne malentendante s’isole et préfère s’épargner le risque répété des échecs dans l’interaction. Cela est particulièrement vrai dans le monde de l’entreprise.
Si la perte d’audition est une question à laquelle des réponses techniques et pratiques peuvent être apportées, le premier levier d’action est d’ordre psychologique : la reconnaissance du problème par le collaborateur, sa hiérarchie et ses collègues sont des conditions sine qua non à la mise en place des bonnes pratiques d’accompagnement de cette situation de handicap.
JNA - GUIDE INCLUSION - 5





































































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